Asie - Pacifique
Sri Lanka
-
Classement 2024
150/ 180
Score : 35,21
Indicateur politique
147
30.43
Indicateur économique
154
32.16
Indicateur législatif
139
42.19
Indicateur social
165
29.61
Indicateur sécuritaire
140
41.68
Classement 2023
135/ 180
Score : 45,85
Indicateur politique
146
40.94
Indicateur économique
76
48.53
Indicateur législatif
143
43.40
Indicateur social
148
42.05
Indicateur sécuritaire
116
54.32

La question de la liberté de la presse est intimement liée à la guerre civile qui a ravagé l’île jusqu’en 2009, et aux crimes, toujours impunis, qui ont visé de nombreux journalistes dans la foulée de l'écrasement de la rébellion tamoule. Avec une presse extrêmement concentrée et dépendante des grands clans politiques, le journalisme est toujours en péril dans ce pays de 22 millions d’habitants. 

Paysage médiatique

Le poids des médias d’État est déterminant. Le ministère des Médias de masse dirige, entre autres, la Sri Lanka Broadcasting Corporation (SLBC), la Rupavahini Corporation (SLRC), l’Independent Television Network (ITN) ou l’Associated Newspapers of Ceylon Limited (ANCL), autant d’organes de presse dont les rédactions – papier, radio, TV et web – disposent d’une très faible indépendance éditoriale. La situation des journalistes dans le secteur privé n’est guère différente, les propriétaires des grands médias étant, pour la majorité, clairement affiliés à un bord politique. En presse écrite, les quatre plus gros propriétaires de journaux se partagent les trois quarts du lectorat. Le principal groupe de presse, Lake House, qui appartient à la famille Wijewardene, détient à lui seul plus de la moitié des publications du pays. Selon une étude de RSF, moins d’un Srilankais sur cinq a accès à un média politiquement indépendant.

Contexte politique

La situation politique est extrêmement volatile depuis la crise politique, aussi appelée “Aragalaya”, ou “lutte”, qui a secoué l’île en 2022. Ce vaste mouvement de protestation de la société civile a conduit à la chute du clan Rajapaksa, du nom de l’ancien président de la République qui a fui le Sri Lanka en juillet 2022. Celui-ci s’était notamment affirmé, entre 2005 et 2015, comme chef du “gang des camionnettes blanches” – en référence aux véhicules dans lesquels au moins 14 journalistes ont été enlevés pour être exécutés. Si sa destitution marque la fin de sa politique implacable de répression de la liberté de la presse, le paysage médiatique reste extrêmement polarisé et soumis aux aléas politiques. 

Cadre légal

La loi sri-lankaise ne fixe pas de restriction à la liberté d'expression, mais rien ne garantit la protection des journalistes. Le statut du Conseil de la presse, créé par une loi de 1973 pour “réguler” le secteur, pose clairement un problème puisque la présidence de la République décide de la nomination de la majorité de ses membres. La loi sur la prévention du terrorisme est régulièrement invoquée par les autorités pour faire taire les journalistes, à commencer par ceux qui tentent d’enquêter sur les conditions de vie de la minorité tamoule dans le nord et l’est de l’île. En janvier 2024, le Parlement a voté une loi sur la régulation d’Internet, qui crée la Commission sur la sécurité en ligne, dont les membres sont nommés par le Président. Sous couvert de défense de la “sécurité nationale”, elle peut censurer les contenus et les comptes de voix dissidentes sur les réseaux sociaux, ainsi que lever la confidentialité de leurs sources.

Contexte économique

Le marché des médias grand public est extrêmement concentré. Dans l’audiovisuel, les quatre géants du secteur se partagent près de 80 % des audiences. Dans ce contexte, les autorités politiques peuvent exercer une influence considérable sur les nominations ou les licenciements des rédacteurs en chef, que ce soit par le biais d’amitiés politiques, de chantage aux subventions et aux annonces publicitaires ou, tout simplement, par la corruption. Résultat, c’est désormais sur Internet que l’on trouve des contenus informatifs plus indépendants, à l’instar des chaînes en ligne. Les journalistes qui les animent ne sont pas pour autant exempts de pressions et d’intimidations

Contexte socioculturel

La presse sri-lankaise s’adresse en priorité à la majorité cinghalaise et bouddhiste, soit les trois quarts de la population. Dans ce contexte, il est extrêmement dangereux de formuler des critiques ouvertes de la religion bouddhiste ou de son clergé, le parquet ayant par le passé invoqué le Code pénal pour jeter en prison des journalistes soupçonnés de haine religieuse. De façon plus générale, traiter des questions relatives aux minorités tamoules ou musulmanes est considéré comme extrêmement sensible. Les journalistes et les médias qui s’y sont risqués ces dernières années ont été visés par des arrestations, des menaces de mort ou des cyberattaques coordonnées. 

Sécurité

Les professionnels des médias ont été victimes de meurtres et de disparitions au cours des deux dernières décennies, marquées par l’écrasement de la rébellion séparatiste des Tigres tamouls. Alors que les meurtres de journalistes ont cessé depuis 2015, l’impunité reste totale. Année du dixième anniversaire de la fin de la guerre civile, 2019 a été marquée par une inquiétante hausse des attaques contre les reporters basés dans le nord et sur la côte est du Sri Lanka, lieu traditionnel de peuplement tamoul. Les journalistes y sont systématiquement suivis et harcelés par la police et l’armée. Ces zones sont globalement fermées aux médias indépendants.